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Les Baladantes
4 juin 2014

Nostalgie des mots anciens

Beaucoup de fou rires pour cet atelier qui nous a plongé dans une autre époque

C'était l'anniversaire d'Odile, voici ma composition:

Chère Odile,

 En cet évent exceptionnel, toi aussi belle qu’une happelourde, je te propose de croustiller ensemble et d’en faire une douce remembrance.

Que cette année te permette de t’acagnarder sans aucunes périodes rafalées

Que cette bonace te rasséréne.

Evite de t’emberlucoquer avec un muche non déparpaillé qui te contre-aimerait à coup de tartouillade ou avec un rodomont qui risquerait de te férociser et de faire semblant de t’offrir le frusquin.


Toi, le pantophile, ne deviens pas pour autant un mache dru, ne te nourris pas que de demi passion et surtout gardes ta belle sémillance.

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15 mai 2014

Ces mouches qui nous embêtent!

La ligue13  Mai 2014

  JACKI

les mouches

Coucou la Mouche !

où vas-tu ainsi vêtue ?
tu voles sur les produits de bouche ,
ah non , te voilà dans la douche.
mais où es-tu ?on entendrait une mouche voler.
où te caches-tu ? sous la couche ?
ça y est ! j'ai compris : tu as pris la mouche.

Mais dis moi quelle mouche t'a piqué ?
car aussitôt repérée tu fais mine de t'en aller.

Pour aller où, dis-moi ? sur un bateau mouche ?
vers le sud ,là où le soleil frappe fort
 retrouver tes consœurs et faire la fête au dehors
Sais - tu qu'ils ont des moustiquaires 
pour entraver ton itinéraire ?

Ici point de tout cela;tu vas ,tu viens
 au gré de tes envies
pas d'insecticides , pas d'homicides, que des douceurs

dans ce ballet aérien qu'aucun chorégraphe n'a prédit
tu laisses libre cours à tes envies , à tes humeurs
légère et spontanée si on te laisse exister
aucun GPS,aucune boussole si ce n'est ta liberté

pas de frontières , pas de panneaux
du sol au plafond , des chaussures aux napperons
du mur aux rideaux , du lustre aux tableaux
tout ceci est ton territoire , ton terrain de jeux
tu peux y rester autant que tu veux .

N'es-tu pas bien ici ? tu vois je ne suis pas farouche
je ne ferais pas de mal à une mouche

Jocelyne

 

J’ai longtemps, longtemps, trop longtemps peut être accompagné de nombreux enfants en perte de repères pour ne pas avoir ignoré ce que le mot « mouche » signifiait.-

-Certains d’entre eux possédaient une écriture massacrée en pate de mouche

- D’autres prenaient la mouche aussitôt qu’une remarque de ma part était formulée sans prendre le temps de déceler l’intention bienveillante qui s’y cachait.
- D’autres enfants encore plus inhibés gobaient les mouches, les regardant voler et n’auraient fait de mal à aucunes d’entre elles tant ils s’épanouissaient engourdis par la chaleur des radiateurs du fond de la classe.

- Parfois, face  cette torpeur ambiante, je réagissais comme si une mouche m’avait piqué et consciente qu’on ne les a jamais attrapées avec du vinaigre, j’interrogeais le plus passif d’entre eux en lui demandant de reformuler le dernier mot de mon discours. Et là !!!Je faisais mouche. On entendait les mouches voler. L’enfant ainsi piégé me regardait désespéré ….Il avait honte…Comme si j’avais rusé malgré moi à être la mouche du coche afin d’en retirer une jouissance qui consistait à les faire tomber comme des mouches, dans le gouffre de l’échec.
- A cet instant là j’aurais souhaité m’appliquer une mouche sur les lèvres afin de ne plus les ouvrir et me cacher dans les cales d’un bateau mouche.

11 avril 2014

Des haïkus qui nous font voyager

 

Ligue13 Avril

JACKI:

 

A propos des Comores

A propos des Comores :

  •     Les nuages caressent le nombril du Karthala ( volcan )

 

  •         Après la pluie ,les couleurs de l'arc-en-ciel fleurissent le chemin vers l'infini

                           

  •      Joie de l'enfant devant la rondelle de saucisson
  •        Boutres amarrées,frêles embarcations devant les mâchoires de l'océan
  •       Silhouettes verticales déambulant au milieu de nulle part

 

  •        Pamplemousses,bananes et avocats se disputent la place sur les étals

 

  •       Chiromanis chatoyants ondulant sur les hanches des femmes .

 

  •       Ombre fraiche , nature généreuse, verdoyante et apaisante

 

  •       S'endormir avec le bruit enveloppant des vagues qui vous bercent,qui vous bercent ,qui vous bercent



  •        Visages d'homme sur les damiers, le temps s'est arrêté

 

  •       Poissons pêchés ; sitôt grillés , sitôt mangés

 

Sophie:Souvenirs de Sénanque (Juillet 2011) 

 

 

 

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Cachés au détour

Du chemin, voiltoits,

Puis l’édifice.

Œil du photographe

Parfum de lavande bleue

Ombrelle blanche.

 

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Jambes et gorges nues

Jolie mini-robe verte

Châle pour cacher l’indécence.

Mystérieuses voûtes,

clés puissantes, secret

des architectes

 

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Avant le mètre,

le corps, coudés, pieds, pouces

brassée, empans, toise.

Austère précision

des pierres taillées aux angles

impeccables.

 

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Voix éteintes des

prieurs cisterciens d’antan.

Souffle dans les couloirs

Cellules des moines

pieux ou fanatiques

hors du temps et du monde.

 

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Vaste salle dorée.

Lecture du texte saint

Pauvre pitance.

Jardin de simples

Connaissances botaniques.

Bientôt la chute ?

 

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14 mars 2014

L'art d'inventer de nouveaux métiers

Ligue 13 Marseille, mars 2014

 Marilyn

Le parleur de portes

 

Il y a des portes en bois, des portes vitrées, des portes monumentales ou des portillons.

Moi, je parle aux portes, je parle des portes, je parle à travers les portes et parfois à des êtres humains qui m'ont ouvert leur porte.

Je suis parleur de portes. C'est mon métier.

Je l'ai appris sur le tard, quand après vingt ans de bons et loyaux services à l'usine on m'a mis à la porte. J'ai cherché du travail. J'ai fait du porte à porte. Et j'ai compris ma vocation : la porte. La porte au double visage, Janus des Latins, le recto qui ne peut se passer du verso.

Je parle à la porte. Tagguée ou encaustiquée, elle me regarde; mais q'il y a-t-il derrière elle ? Cette interrogation me taraude parfois au point de la frapper. Je frappe à la porte. Alors elle s'anime, mais je suis souvent déçu. L'envers ne vaut pas mon espérance. Mais je m'égare...

Je suis parleur de portes. C'est mon métier. Je leur raconte des douceurs. Car vous savez, c'est susceptible une porte, çà vous claque au nez comme un rien. Mes employeurs la croient à leur merci. Ils exigent qu'elle leur obéisse, qu'elles s'ouvre ou se ferme selon leur désir à eux. Et gare  si elle couine ! Quelle illusion ...

 

La porte, elle agit à son gré. Vous pensez pouvoir la forcer par une vigoureuse poussée, ou bien  l'amadouer d'une nonchalance bienveillante. Vous n'obtiendrez qu'à  la faire bailler d'impatience, ou  au mieux, s'entrebailler.

Je suis parleurs de portes, je sais les mots qu'il faut.

N'appelez pas le serrurier, je suis là.

En cas d'urgence sommez-la de se prendre.  Si elle n'est pas blindée, elle s'emportera  et  sortira de ses gonds. Mais quelle souffrance inutile ! Appelez-moi plutôt: Je suis parleur de portes.

 

 

Sophie

Le raconteur de tissus

Les origines de ce métier sont aujourd’hui incertaines. Elles se confondraient avec l’invention de diverses formes de tissage en différents points du globe. L’antériorité pourrait revenir à l’Afrique ou à l’Asie.

Le raconteur de tissus, qui souvent, soit dit en passant, est une raconteuse a le don de lire dans l’armure des textiles de vertigineux récits. Sa science s’adapte à la condition de son objet. Un tissu d’ameublement lui fera raconter l’histoire de la demeure qu’il orne, et parfois même de ses habitants. Le vêtement, qu’il pare les vivants ou s’enroule autour des morts, suscite selon les cas de véritables hagiographies ou d’impitoyables réquisitoires. Et le raconteur de tissus paye son don d’une terrible malédiction. Il ne peut pas se taire. C’est ainsi qu’il se met constamment en danger suscitant la colère des puissants acharnés à sa perte. Inutile de vous préciser que fort peu d’entres-eux ont envie d’exposer les dessous de leur réussite. Ceci explique que les rares raconteurs de tissus aujourd’hui survivants se cachent. Poursuivis par la terrible accusation qui leur reproche de ne proférer que des tissus de mensonges, ils ne renoncent pas à leur métier. Beaucoup préfèrent s’enchaîner pour tramer d’improbables motifs aux couleurs chamarrées. Le texte finit par se confondre avec le textile et, pour qui sait encore le lire, il perpétuera la tradition bien après l’extinction du dernier raconteur de tissus.

 

 Toile de Paracas - LACMA Musée de Los Angeles 

 

 

21 février 2014

Qu'est ce qui se cache dans mon sac?

ccc 002Ligue13 Marseille Février 2014

 

JACKI

20/02/2014   Inventaire de mon sac

Jacki a choisi un appareil photo numérique apporté par quelqu’un du groupe

 

Un appareil photo nommé CANON , c'est drôle ,non?

 

Un canon est un engin de guerre destiné

à éliminer, à pulvériser , à exterminer

mais ce petit objet , à l'air inoffensif ;

calme et plat , il tient dans une main

comme léger , presque aérien .

 

C'est vrai qu'il vise, mais où est sa cible ?

un visage , un paysage

un monument , un bâtiment ,

un pétale , une nervure ,

un détail , une sculpture ,

une mer calme où glisse un voilier ,

un sourire sur un enfant , accroché ,

un soleil , un été ,

une merveille , des souvenirs fabriqués....

 

Quelque soit la saison ,quelque soit la couleur ,

quelque soit la musique et où que soit le cœur,

il puise dans la vie , il cherche dans le temps

le détail invisible , l' harmonie d'un printemps .

Il fige pour toujours la présence et l'absence

les retrouvailles et la reconnaissance

le voyage et l'ailleurs , cette quête éternelle

de découvertes et de splendeurs.

 

Ce canon ne fait pas de bruit , discret ,

il sait se faire oublier ;

aucun son , aucune pétarade ,

de son œil aguerri il guette le photographiable.

 

Le mouvement est inverse;c'est l’extérieur qui pénètre par cette fenêtre.

Des lignes vives ,des formes et des perspectives

de la lumière et des pixels , des teintes et des pastels ,

des contrastes et des camaïeux ,

pour essayer de rendre ce que nous ont donné les Dieux.

 

Pour tenter d'approcher la beauté

dans son infinie diversité

et restituer l'émotion pure

de celui qui voit pour la première fois ;

avec un œil neuf , caresser du regard ,

découvrir , s’émerveiller et s’émouvoir

encore....encore une fois .

 

Sophie a aussi choisi l'appareil photo

L’appareil photo.

Objet magique par ce qu’il accomplit. Ne dit-on pas qu’il capture non seulement l’image mais aussi l’âme de ceux qui se dressent devant lui ? Ce serait alors un objet violent, une arme presque manipulée par un photographe colonisateur qui s’approprierait les biens les plus précieux. Un coup d’œil dans le viseur, et hop, te voilà dans la boîte, tu m’appartiens.

Il ya d’ailleurs outre le viseur, d’autres similitudes entre l’appareil photo et l’arme. Ne dit-on pas que ceux qui les manient sont des chasseurs ?

Le chasseur d’images affectionne la nature et les animaux qui la peuplent. Il est patient, il traque puis il attend pour saisir le cliché qui révélera son talent et le fera riche. Le même, en milieu urbain, s’appelle un paparazzo. Drôle d’oiseaux. Il poursuit les célébrités, de préférence riches et décoratives. Il fait de leur image son fonds de commerce. Il faut reconnaître quelques qualités à ce vautour. Il sait cadrer a, c’est pas parfait, dommage, j’t’ai coupé le bout des doigts.

- Oui, et puis là, t’as vu ta mer ? Elle penche, on croirait qu’elle va se vider.

- Et plus là, côté couleur, c’est un peu fade. 

- Ben oui, pas de ma faute si quand j’ai le temps de sortir l’appareil il fait tout gris.

- Bon, et puis alors, pour la profondeur de champ, on en reparlera.

- Et pourtant, que la montagne était jolie.

Mais tout ça, c’est pas grave, parce que si l’appareil photo est un objet magique, c’est aussi parce que depuis son invention au XIXe siècle, il a su profiter de tous les progrès de la technologie. Fini l’argentique, bonjour le numérique. Il n’y a plus de défauts dont une retouche ne puisse venir à bout. Alors au lieu d’apprendre à cadre et à jouer avec la lumière en dosant vitesse d’obturation et ouverture du diaphragme, on bidouille avec un logiciel et on se prend tous pour des Henri Cartier-Bresson.

D’ailleurs, bientôt notre appareil photo, il aura même plus besoin de nous pour se déclencher. Il suffira qu vol. Et pourtant, les clichés de ce charognard méritent rarement d’être encadrés.

L’appareil photo accompagne aussi de nombreux amateurs dont les images sans prétention pourraient toujours être réussies, si…

- Ben oui, côté cadrageu’on lui fasse un sourire et hop, il est pas beau mon auto-portrait ? Parce que le genre le plus en vogue, celui qui a de l’avenir, non, ce n’est pas le paysage, merci Monsieur Ansel Adams, ce n’est pas l’animalier non plus, au revoir à tous les Frédéric Rossif de mon enfance, c’est le selfie. Parce qu’aujourd’hui, l’appareil photo, il ne risque plus de voler l’âme des autres. Il faudrait pour cela qu’on le tournât encore vers les autres. Mais aujourd’hui, ce qu’on préfère, c’est le tenir à bout de bras, pour le tourner vers soi.

Serait-ce par hasard que l’on est à la recherche de son âme ?

 

 

 

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27 janvier 2014

Atelier d'écriture sur l'Inde

Des images de l'encens et une musique envoutante pour cet atelier spécial Inde

 

 Z’Oiseau commença une prière compliquée en tamoul qu’il me demanda de répéter après lui. Je trébuchais sur les mots, me perdais dans l’entrelac des phrases, terrorisé à l’idée d’offenser nos dieux.

Ici Mariamen, la déesse mère, au centre de l’autel, environnée de lampes qui luisaient dans la semi-obscurité, là Aiyanar Sasta, sur son cheval, brandissant son sabre vengeur, plus loin Kannavédi au faciès d’éléphant et Katavarayen, tous peints en jaune, hormis le blanc Aiyanar Sasta.

“Ils sont fâchés contre nous… murmura Z’Oiseau, alors, il faut sans cesse les apaiser, sinon…”

“Pourquoi les dieux sont-ils fâchés contre nous ? fis-je, rassemblant tout mon courage.

- Ce serait trop long à expliquer. Une autre fois ! Enfin, si tu veux vraiment savoir… eh ben...................A vous de poursuivre

He ben!
He ben! Je n’en sais rien.
Sont-ils fâchés contre les animaux? Je ne crois pas. L’éléphant et le buffle peuvent bien se rouler
dans les eaux sacrées des fleuves de montagne, les singes et les lézards batifoler sur les ruines des
temples dans la jungle. Point de colères des dieux.
Sont-ils fâchés contre les arbres et les fleures? Ho! que non. Le lotus au grès du courant dérive
doucement, le cocotier et l’hibiscus se balancent innocents au souffle du vent. Les dieux sont
bienveillants.
Sont-ils fâchés contre les pierres? Nullement. Les mille cailloux du chemins guettent chaque pas du
voyageur, les vagues outre-mer roulent le galet blanc et le sable doré, et les pierres précieuses
reflètent à l’infini la lumière des astres du jour et de la nuit, et je vois les dieux sourire.
Les dieux ne sont pas fâchés contre nous, pourquoi le seraient-ils?
Les pierres servent à construire des temples, à sculpter des images, à orner des sanctuaires. Les
fleurs et les feuilles décorent l’entrée des lieux sacrés, qui sont gardés par tout un panthéon
d’animaux.
Alors tout est bien, je peux sourire, la voie est là devant moi, les dieux ne sont pas fâchés, puisque
je suis à ma juste place, tout comme l’éléphant, le lotus et le cristal, et les dieux eux-même à leurs
places.
Godestrum, godestrum, godestrum... ad libitum.

Frédéric

 

 

           Une volute bleutée m'empêchait de voir nettement la jeune femme au sari jaune safran assise devant moi. Une musique lancinante me transperçait le corps transformant mes organes en caisse de résonance. Quelques paillettes voletaient dans l'air saturé d'encens.
Pourquoi Banou avait-elle été si jolie que Katavarayen, le dieu des moissons en était tombé follement amoureux ? Ayamas Sasta n'avait pas supporté qu'un Dieu puisse tomber amoureux d'une mortelle et avait engagé un combat incessant contre Katavarayen, ne réussissant qu'à envenimer la situation et à semer la zizanie car les Dieux lassés de ce combat qui durait depuis des années prirent partie pour l'un ou l'autre et s'engagèrent dans la bataille. Le domaine paisible des immortels se transforma en champs de bataille monstrueux qui donna aux humains un spectacle déplorable de la conduite des Dieux.

Banou, jeune fille fraîche et radieuse se fana au fil des ans. Elle avait accepté de rester libre pour un immortel et l'attente lui devenait insupportable. Des rides se creusèrent avec le temps, ses yeux perdirent leur éclat joyeux. La solitude lui pesait, elle désirait tellement une famille. Les Dieux se battaient encore et encore loin de la réalité de sa vie d'esseulée. Sa voisine aussi dévastée qu'elle car elle venait de perdre son mari construisit son bûchée de veuve. Banou la rejoignit alors que le village était réni pour allumer les premières brindilles. Elle attrapa la main de la veuve pour se donner du courage et elles s'élancèrent d'un seul élan aux milieux des flammes.

L'annonce de la mort de Banou arrêta net les combats des Dieux qui se sentirent peu respecter par une humaine qui avait eu l'audace de contrer le désir de l'un des leurs, leur colère gronda et gronde encore.

F.

12 février 2013

Inspiré par Edward Hopper

Une belle expo au Grand Palais à Paris

Tout l'univers esthétique de Hopper nous parle, the american way of life!

On a envie d'imaginer la vie des sujets peints par Hopper, loin d'être énigmatiques on a l'impression  qu'ils vont se mettre à nous raconter leur vie, leur histoire.

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Frédéric POYET

Edward Hooper: «excursion into philosophy» 1959               excursion-into-philosophy-530x398

Quel con! Putain quel con!

Quand je pense qu’on est venu ici pour se retrouver.

Marre de ce soleil imbécile.

Cette lumière me donne envie de gerber.

Pourquoi cette incapacité à réagir?

Je suis là, plus seul(e) que jamais, pétrifié(e).

J’arrive plus à penser, vidé(e) tout simplement vidé(e).

Et l’autre débile, peut pas dire quelque chose.

Faut vraiment que je me barre, j’étouffe, je crève.

Si j’entend une mouette, j’me lève et je m’casse.

So long,

goodbye evry body...

Ca fait vingt ans, je m’en souviens comme si c’était hier.

D’ailleurs à chaque fois que j’entend le cri d’une mouette je repense à cette après-midi.

Merci la Mouette, j’étais incapable de décider.

Je me suis levé(e).

- Ou tu vas?

- Je descends chercher des clopes, qu’est-ce que ça peut te foutre?

Le parquet craque, la porte claque, je sens l’odeur de vielle moquette de l’escalier,

les effluves d’une vague pourriture.

Puis cette bouffée d’air marin quand je suis sorti(e) sur le perron.

De l’autre côté de la rue au bus-stop, un Greyhound.

Il va où? J’m’en fous! Il démarre.

-Attendez!

Deux dollars fifty cents.

A l’arrière je m’endors.

C’était hier, il y a vingt ans,

Goodbye so long.

 

Christophe LAROCHE

625x351!                  C’est le moment.                                        

Sa vie, William Johnson, avait tout pour la réussir.

Il était le fils de Georges Johnson, P.D.G. de la Johnson & Johnson corporation qui assurait plus de la moitié des habitants de l’Etat. La Double J comme aimaient la nommer les assurés, témoignage du lien intime qui les liait à la compagnie.

Une voie toute tracée s’offrait à William, déclinaison d’un destin on ne peut plus banal. Il succédera à son père à la tête de la Double J avec en héritage la considération de tous ces anonymes.

Seulement voilà, c’est justement cela qui lui posait problème. Son tempérament, il en avait un, s’accordait mal avec une vie sans effort où tout était déterminé par avance.

Il avait besoin de prouver à son entourage qu’il avait les compétences requises, qu’il méritait à part entière d’accéder à ce sommet que d’aucuns, parmi les associés de son père, pouvaient convoiter.

Il s’était mis à travailler avec acharnement, passant le plus clair de son temps à éplucher avec la plus grande méticulosité le moindre dossier, relevant ici une erreur de filiation, là une mauvaise adresse.

Cette constance dans le labeur suffisait à lui donner bonne conscience. S’il arrivait un jour, comme prévu, à la tête de la Double J, ce ne serait pas par pure convenance héréditaire.

Travaillant tard tous les soirs, sa vie sociale s’en trouvait réduite à l’extrême. Comme vissé à son fauteuil, à peine jetait-il de temps à autre un regard furtif autour de lui, sans jamais s’attarder sur un quelconque élément périphérique. Même si cet élément s’appelait Samantha, la secrétaire avec qui il partageait son vaste bureau depuis bientôt deux ans. Le meilleur moyen pour ne pas se laisser distraire par les arguments plastiques de sa subalterne.

C’était son père qui était derrière le choix de cette « partenaire de travail », mots qu’il avait utilisé pour la lui présenter le premier jour. Il ne lui fallut pas longtemps pour comprendre que Samantha était l’objet d’un plan prémédité. Que Georges Johnson, face à l’extrême pauvreté de sa vie affective, avait cru bon de prendre les choses en main.

L’idée que son père avait osé programmer Samantha comme l’éventuelle mère du petit-fils qu’il désirait pour assurer la succession future de la Double J l’avait rendu malade, le décidant à s’enfermer encore plus hermétiquement dans son travail. Cette situation lui était apparue d’autant plus insupportable qu’il était persuadé que Samantha, s’étant prêté à un jeu qui la dépassait, n’avait sincèrement aucune envie de partager sa vie avec un individu aussi peu engageant que sa personne.

 

Il est tard. Les secondes passent, et Samantha n’a pas quitté le meuble pour dossiers suspendus, les mains posées sur l’avant du tiroir entrouvert à sa hauteur, le regard fixé sur une feuille au pied du bureau de William Johnson.

“ Deux ans ! Cela fait bientôt deux ans que je travaille pour lui sans qu’il semble s’intéresser à ma personne. Jamais, il n’a daigné me regarder dans les yeux. Seulement quelques coups d’œil furtifs, sans âme.

Mais qu’a-t-il donc pour m’ignorer de la sorte ?

Son père m’aurait-il mené en bateau ?

C’est parce que monsieur est le fils du patron que monsieur n’a pas plus de considération pour sa secrétaire que pour un vulgaire dossier ?

Mais qu’est-ce qu’il lui faut à ce blondinet pour observer la réalité en face ?

Une belle brune avec « une carrosserie à faire pâlir les plus belles américaines », comme aime à le répéter mon garagiste, cela ne lui fait aucun effet ?

Il est en marbre ou quoi ce « bouffe-paperasse » ?

Ou alors, c’est qu’il est gay ?

Ce serait bien ma veine.

Allez une dernière tentative pour en avoir le cœur net.

Cette scène, je l’ai répétée mille fois dans ma tête.

La feuille est enfin tombée au bon endroit, c’est le moment.

N’oublie pas d’ouvrir le haut de ton chemisier ma chérie, puis va la ramasser tranquillement, cette feuille, en prenant bien ton temps.

Rester accroupie, relever la tête, se cambrer suffisamment pour mettre en valeur cette poitrine généreuse dont la nature t’a pourvue.

Un petit raclement de gorge pour le sortir de sa torpeur. Un sourire suggestif. Et là on verra bien si cette vision d’une femme désirable et offerte le laisse toujours de glace, ce gommeux !

Allez vas-y ma chérie, dis-toi bien que le jeu en vaut la chandelle ! ”

 

3 décembre 2012

Le Journal de Franz Kafka

03 décembre 2011

Aujourd’hui, passé tout l’après-midi sur le canapé dans un état de fatigue douloureuse. Le bruit du balais qu’on passe sur le tapis dans la chambre d’à-côté est perçu par l’oreille comme celui d’une traîne qui bouge par saccades. 18 mars 1912.
Le monde prodigieux que j’ai dans la tête. Mais comment me libérer et le libérer sans me déchirer. Et plutôt mille fois être déchiré que le retenir en moi ou l’enterrer. 21 juin 1913.
Le couple en voyage de noces qui sortait de l’hôtel de Saxe, dans l’après-midi.Mettent une carte à la boîte. Visages peu  caractéristiques à première vue. 1er juillet 1913.
Un collier de petites boules d’or sur un cou bruni. 3 juillet 1913.

YIN

En montant les marches, j'aperçois un cacatoès sur une branche juste à côté de Ludovic, torse nue, un peu penché comme pour prendre une pause avec l'oiseau. Je lui demande : - d'où vient ce perroquet ? - il me regarde et me dit : quel oiseau ? je lui dis : ne bouge pas sinon il va avoir peur, et il n'en croit pas ses yeux ! et moi, je n'ai pas rêvé !

dimanche : le long du bord de mer vers la calanque de Marseilleveyre un dimanche matin, assis sur les rochers, on observe la beauté des vagues qui dansent devant nous, et je vois devant mes yeux tous les détails des tableaux de HOKUSAI, quelle merveille !

lundi : Dans la rame bondée, je suis debout devant les portes ouvertes lorsqu'un jeune homme déboule et fonce sur moi comme un taureau, sans réfléchir en m'écrasant les pieds ; simultanément, je le pousse instinctivement et les portes se referment synchro...tout le monde a ri !!!

mardi : Une femme très élégante, moderne, un tel à l'oreille en parlant fort et faisant les cent pas sur une distance de 50 mètres, je la vois pour la 4e fois au même endroit, dans la résidence d'une amie qui m'a dit quelle n'est pas folle mais j'ai du mal à le croire !

mercredi : Vers midi, sur le chemin de ma randonnée, un marcassin déboule tout seul l'air perdu ; je me dis oh ! attention à la maman, monte sur ce rocher, on ne sait jamais !  quelques minutes après, des bruits bizarres me mettent en alerte, je brandis mes bâtons, et que vois-je ? un cycliste !

jeudi : Temps de chien sur Marseille, arrêtée au feu sur le boulevard Michelet, un homme ouvre ma portière pour que je l'emmène jusqu'à l'Obélisque à 1km de là. Tout le long du chemin, feu après feu, il n'a pas fermé la bouche en me posant des questions sans queue ni tête auxquelles j'ai pu répondre avec un tact qui m'impressionne encore pour m'en défaire sans problème majeur à l'endroit indiqué mais sous la moquerie des jeunes du quartier...j'en ris encore !

vendredi : Un souvenir inoubliable dans un bus marseillais un après-midi ensoleillé où quelques femmes parlent fort avec un garçon de 10 ou 11 ans qui tchatche avec l'accent si beau et si vivant qui enchante mes oreilles habituées à l'accent parisien. Quel bel acteur !

samedi : En sortant du SMUC, ma voiture est pleine mais je m'arrête quand même devant 4 ados qui me prient de les prendre ; je leur demande où ils vont ?  -  à la station Total, à 300m de là !!! je les ai entassés comme dans un poulailler, contents et reconnaissants.

 

VERONIQUE RENARD

Dimanche: Ballade à Callelongue avec nos chers amis. Je suis séduite par la décoration du restaurant « La Grotte » : des vieux tableaux, des tables et des chaises Louis XV et XVI, du dorés, des drapés... tout est décalé dans ce lieu où on attendrait lambris et santons.

Lundi: J'avais oublié la sensation de la fièvre (celle de la grippe pas l'acheteuse ou l'amoureuse).

Mardi: L'état d'enrhumées : oreilles bouchées, nez bouché, cerveau bouché ?

Mercredi: 14h je fais les courses au SuperU d'Endoume. C'est un endroit avec une chouette ambiance. César est le maître du pèse légumes : les mamies sont contentes.

Jeudi: Rendez vous avec la prof de math de Léon. Mais pourquoi les profs veulent ils toujours vous expliquer les contrôles ratés de vos enfants... moi la géométrie m'a toujours tétanisée, c'est apparemment encore le cas

Vendredi: 9H Galerie Lafayette, il y a une malle énorme rouge pailletée dans l'entrée du magasin... mais à quoi sert-elle ?

Samedi: La plage des Catalans. J'aimerai tellement pouvoir me baigner... avec une combinaison ? Ou pas... je suis trop flemmarde.

 

 

SABINE RIMAUD

DIMANCHE :

Magalone XVIIIème, Le Corbuzier XXème siècle.

Cinq tableaux vivants, trois petites notes sans cesse répétées pour nous transporter.

Corps de femmes corps d’enfants, des gestes au ralenti, une caresse d’infini.

Nous retenons nos souffles jusqu’au cadeau final : deux belles oiseaux clowns, toujours au ralenti, vont nous offrir le thé ; mêmes notes répétées.

Le soleil est de soie et la mer est si rose ; nous sommes proches du silence, nous sommes proches du merci.

LUNDI:

Un clochard dans sa bulle m’aborde en grommelant : « je peux vous raconter ? »

Et là-bas, en haut des Réformés, j’entends l’histoire d’une mère ;

« Mais pourquoi n’est-elle pas venue au rendez-vous ? » me demande-t-il

MARDI:

C’est la ville, c est le flux des flots de véhicules.

Atteindrai-je sans dommage la salle de notre dame ou cartons et jetons vont se tirer la bourre ?

MERCREDI:

Qu’elle est froide la Major, église inhabitée où il est si facile de ne pas croire en Dieu.

Quant au soir Belle de Mai, pourquoi avoir profité de mes noires  amitiés pour défoncer les yeux doux

De ma petite voiture ?  Lâcheté des véhicules absents.

JEUDI: 

  Eclats de texte dans une nuit arabe.

Cinq vies se croisent autour d’une femme blanche.

Dans son sommeil malade viendront se profiler des morts invraisemblables :

Un homme embrasse la femme et devient minuscule, tombe dans une bouteille ambrée et  là sera jeté

du haut d’un balconnet sans que personne ne sache.

Quant à la femme arabe elle viendra poignarder son amant empêtré dans des placards d’immeuble.

C’est donc l’histoire d’un texte où les voisins se cognent à force de croiser sans pouvoir se parler

VENDREDI:

Le fou rire de ces jeunes ados qui m’accompagnent découvrant à plein rire que les vieux n’entendent plus

SAMEDI:

Oh  Qi cong mon amour ! Je ne cesse de bailler. Qu’il est bon de tout abandonner de mes fatigues multiples

 

ODILE  NOUVEAU

Dimanche 27/11/11 :

Cette jeune fille blonde, élancée portant la vie retient mon regard. Porteuse d’un enfant désiré ?

Lundi 28/11/11

Marianne m’entraîne dans cette boulangerie où l’atmosphère m’enchante poétique bric-à- brac d’objets anciens témoins d’un passé. Je m’y sens bien.

Mardi 29/11/11 :

Quelle ironie pour nommer cette cité ! Bâtiments gris de plusieurs étages , délabrés, routes défoncées. Le parc « Kallisté » «  la plus belle » en Corse !Cherchons l’erreur !

Je peux et ne veux pas m’habituer.

Mercredi 30/11/11 :

Ces femmes en maillot de bain, allant et venant avec le sourire aux lèvres dans ce bassin turquoise où l’espoir d’apaiser les douleurs les accueillent , les bernent !

Jeudi 1/12/11

Je ressens un réel plaisir à écrire ce rapport, mes doigts sur l’ordinateur se font plus rapides, les idées fusent. Je jubile !

Vendredi 2/12/11

Il pleut. A la terrasse d’un café , deux jeunes hommes discutent L’un d’eux sort d’un étui une petite guitare, dont j’ai oublié le nom. Peu importe. Une mélodie chaude se fait entendre. Le soleil revient.

Samedi 3/12/11

Une porte vermoulue verte laisse imaginer un jardin comme je les aime. Me rappelant mes vacances d’enfant à la Ciotat en plein cœur de la chaleur de l’été.

 

 

FREDERIC POYET

 

Dimanche 27 novembre:

Soleil, mer, sable

l’eau est vraiment trop froide pour moi,

mais dans le nord il pleut

Alors ouvrir des huitres et le gober!

What else?

 

Lundi 28 novembre:

Cet homme en boule sur le seuil a sans doute passé la nuit dehors.

Immeuble hausmanien, cabinet médical, quelques étages.

Serons-nous mieux en sortant? (lui qui le verra?)

 

Mardi 29 novembre:

Ils sont vraiment beaux ces deux Solex devant le café!

La loi impose maintenant une bête plaque minéralogique, incongrue, comme anachronique.

Tiens lui l’a mise sur le côté symétriquement à sa sacoche. Elle se voit moins.

Et si je veux mettre mon chapeau de travers?

 

Mercredi 30 novembre:

Pourquoi m’a-t-il raconté cette histoire de ticket de péage?

Ok il pleuvait,

Ok il fallait sortir de la voiture pour attraper le ticket à la hauteur des cabines des poids-lourds.

Mais pourquoi avoir insulté à l‘interphone la caissière?

Et pourquoi me raconter cette histoire?

 

Jeudi 1 décembre:

Et si c’était vraiment Raymond Depardon?

J’ai envie de rentrer en contact.

Si l’info se confirme, je ferai une lettre.

 

Vendredi 2 décembre:

Sur les vitrines d’un commerce désaffecté de la gare Saint Charles des textes sur des voyages imaginaires.

Les gens passent, pressés.

J’ai du passer devant des dizaines de fois sans rien voir.

Aujourd’hui je les ai lu.

Merci à la main qui m’a ouvert au rêve.

 

Samedi 3 décembre:

J’ai décidé qu’il était Chinois!

Je ne me trompe pas en disant asiatique,

mais pourquoi Chinois?

Il m’a immédiatement été sympathique avec sa casquette kaki.

Pas celle de Mao

Non celle d’un aventurier

qui aurait traversé un désert hollywoodien,

puisqu’elle était complétée d’une écharpe beige...

 

BARBARA SCHMIDT

DIMANCHE

Il fait froid ce soir, je regarde les feuilles de la petite plante verte posée sur le rebord de la fenêtre, les feuilles frémissent à cause de la chaleur du radiateur.

Je regarde cette petite plante dont la couleurs de certaines feuilles me rappellent qu’il faut que je l’arrose, j’oublie toujours d’arroser les plantes, il faut que je m’en souvienne.

 

LUNDI

8h12 je sors de la maison, je traverse le jardin, de la terre molle se colle à la semelle de mes bottes toutes neuves, ça m’embete un peu….

 

MARDI

La comptable qui était en maladie depuis plus d’un mois est revenue,

quelque chose a changé chez elle , je n’arrive pas à savoir ce qui a changé, ces cheveux blond platine je crois…. . On me dit discrètement, « elle a fait des extensions... »

 

MERCREDI

Ce soir, j’ai vu passer une souris le long du mur du salon,toute petite mais très rapide.

Je ne l’ai pas revue. Ou peut-elle bien être ?

J’ai vérifié chaque pièce, sous les lits rien,  j’ai écouté le silence, rien.

Je pense qu’elle s’est cachée derrière la machine à laver dans la salle de bain.

Depuis, je passe le temps de ma douche à regarder la machine.

Mais je ne l’ai pas encore revue.

 

JEUDI

Il y a 5 ronds point sur l’avenue du 8 mai 1945 à Marignane

J’y passe tous les matins

Jamais je ne vois personne marcher sur le trottoir

Et les contres allés sont tellement bien entretenues, les haies sont taillées, les fleurs colorées, mais je ne vois là encore jamais personne les entretenir, ca me met un peu mal a l’aise, je ne sais pas pourquoi.

 

VENDREDI

Je suis très en colère ce matin

La journée a été pénible

Je me répète, « il faut que tu voies 3 jolies choses dans la journée »

Le soir, je réalise que les décorations de Noël sont installées l’ours en osier du rond-point que je trouvais si moche si triste dans la grisaille du matin est maintenant tout illuminé

Ça me fait sourire

Une jolie chose il m’en manque .

 

SAMEDI

En descendant en ville, j’ai vu un homme courir sur le bord de la route.

Ça me paraissait dangereux de courir sur cette voie rapide.

Le temps que je passe à son niveau, j’ai remarqué que sa tête était disproportionnée par rapport à son corps si grand.

Sa tête paraissait bien trop petite et bien trop penchée

6 octobre 2012

Métiers imaginaires

Où l'on découvre des petits métiers disparus

LE FABRICANT D'ASTICOTS "Paris anecdote" d'Alexandre PRIVAT d'ANGLEMONT
 LE DONNEUR D'HEURE  de  Cyrille FLEISCHMAN

Où l'on invente des métiers imaginaires

LE DISEUR DE RIENS de PLANTIVE et GUERARD

LES RAMASSEUSES DE RICOCHETS de Rémy LEBOISSETIER

LE BERGER D'EAU d'Henri MICHAUX

 

CLAIRE MORIN

LE DANSEUR DE MER

Qui n'a pas admiré une mer déchaînée un jour de tempête ?

Il est aisé de croire que seule le vent est responsable de cette chorégraphie alors, que derrière tant de beauté se cache le travail assidu du "danseur de mer"

Tout les jours, quelque soit le temps, il vient au bord de la mer, l'observe, l'apprivoise. Avec des gestes cent fois répétés il se coule au milieu d'elle, l'accompagne dans une danse singulière.

L'homme est la mer ne font qu'un, jouant l'un l'autre à dessiner chaque jour des figures nouvelles.

parfois la mer moins docile veut seule jouer sa partition. Alors le danseur tente de reprendre le cour de la séance guidant la mer en des vagues gracieuses. Peine perdue,

l'élève affronte le maître en une danse violente et dévastatrice qui peut sur un simple souffle redevenir douce et apaisante.

 

MICHEL RIMAUD

LES INSEPARABLES

 

1. L’escaladeur de mer était un jeune homme débordant d’énergie.

Il suivait de près la météo, et dès qu’un coup de vent était annoncé, on le voyait arriver, palmes à la main et sourire au visage.

En quelques instants, il avait rejoint les premières lames déferlantes et s’échauffait sur elles, retrouvant ses sensations et sa communion à la nature. Puis il se dirigeait vers les plus grosses vagues, pour peaufiner sa technique : palmage énergique des jambes, et appui vigoureux et alterné des deux bras, munis de petites palmes autour des mains...

Parfois il réussissait à s’embarquer sur un bateau, et pendant que tous les passagers malades se terraient dans leur cabine, il s’attachait par une longue aussière au bateau, et s’élançait dans l’eau, à la recherche des plus grosses déferlantes…

Bien qu’encore jeune, il avait déjà connu l’extase, le nirvana, l’expérience ultime de sa confrérie : par une soirée d’automne, debout sur le pont d’un bateau de vrac, il aperçut le Graal … Un mur d’eau, quelque chose de noir et d’effrayant qui barrait l’horizon; il se rapprochait dangereusement, semant la panique chez les marins, qui courraient aux canotes.

Alors que fusait le mot de ‘vague scélérate’, lui voyait enfin la montagne d’eau de ses rêves,

l’Everest des escaladeurs de mer … Lorsqu’elle fût là, que le bateau commençât sa descente inquiétante avant de recevoir une avalanche gigantesque qui le brisa en deux avec un craquement épouvantable, lui avait eu le temps d’escalader à toute vitesse les trente mètres qui lui faisaient face, et ivre de bonheur, il coupa vite la corde qui le reliait au bateau.

Cela lui sauva la vie, et il se tint sur cette montagne liquide comme sur un énorme dinosaure qu’il aurait apprivoisé, surfant ainsi jusqu’au rivage.

Toute sa vie fut illuminée par cette expérience grandiose, et il y pensait souvent lorsque le temps était trop calme.

 Sinon, il allait voir son ami, le Rameur de feuilles mortes …

 

2. le Rameur de feuilles mortes avait dû assumer une hérédité complexe et contradictoire.

Adorant ramer et naviguer sur les eaux, il avait été victime d’un traumatisme, et ne pouvait plus s’aventurer sur l’élément liquide.

Comment concilier alors cette passion, dont il voulait faire un métier, et l’impossibilité concrète de la vivre ? … Il avait bien essayé de poser sa barque sur le sol d’un jardin public, mais il se sentait terriblement ridicule … et d’ailleurs faillit être embarqué par des messieurs en blouse blanche. Toutefois cela lui attira la sympathie d’un passant, qui lui avoua affronter la même problématique, et qui mieux est, grâce à la magie d’internet, être en liaison avec tout un réseau de « Rameurs empêchés de ramer » …

Notre homme imagina alors mettre en commun toutes ces bonnes volontés, en montant un parc de feuilles mortes, sur lequel lui et ses semblables pourraient ramer à loisir …

Ainsi fût fait ! Non seulement cette solution leur plût à tous, mais notre homme se forgeât ainsi un vrai métier, s’occupant de l’entretien, des formations et gérant toute l’activité des Rameurs de feuilles mortes.

Il avait deux saisons : du printemps à l’hiver, période où les feuilles mortes stockées faisaient merveille, et la saison enneigée, où l’on avait aménagé un stade de neige pour les amateurs.

 Ainsi nos deux amis avaient ils des expériences variées à se raconter !

 

FREDERIC POYET

Qui se souvient de ces temps maudits, ou toutes les eaux étaient encore limpides, et traitreusement cristallines?

 

Il y en eut des drames, et des déconvenues avant que ne fut créée la «Confrérie des badigeonneurs de pluie».

 

Finies les ondées perfides, qui vous mouillaient, jusqu’à l’os, l’honnête passant sortant de chez lui, et incapable de discerner l’averse invisible. Fini le grain scélérat, s’abattant sur le navire en plein océan, avant même que l’équipage de s’équipe de cirés et de kabig.

 

Finies les heures sombres, les Badigeonneurs de pluie savent colorer de toutes les nuances de gris, la petite ondée, ou l’orage de printemps, le crachin dans le brouillard, et même la grêle dévastatrice. Ils ont rendu visible la pluie qui s’annonce, et tout est pour le mieux depuis qu’on créa la fonction tant convoité, de «Capitaine de l’arc-en-ciel», pour annoncer le retour du soleil.

 

SABINE RIMAUD

 

  •  Dis-moi, tu pêches quoi ?
  •  des chaussures
  • en saumure ?
  • en chaussures
  •  en chaussures…
  •  en chaussures. Tatanes - godasses - pompes - grôles ; bref, en chaussures.
  • Je vois. Tu es pêcheur de chaussures.

 

Mais tu pêches quoi comme chaussures ? Parce que là c’est essentiel ce que tu pêches ! Çà te dessine un homme des chaussures !

 

  •  Çà dépend. Si je mets le treillis et que je prends mes seaux, je pêche des bottes. Je ne garde que les bottes sans semelles.

 

Si je mets la minijupe, je chasse des tatanes mûres, celles que l’on peut cuire au four.

 

Avec des lunettes vertes et une perruque en laine, plus le filet de pêche, c’est chasse aux escarpins.

 

Si je prends mon cheval alors je pense aux grôles ;

 

Et le scaphandrier, c’est bien pour les godasses.

 

  • Alors comment tu fais comment pour attraper des pompes ?
  • Des pompes ? Soit précis dans tes questions ! à huile ?

 

À eau ?à sang ? À vélo ?

 

Les pompes à huile c’est pour la noël.

 

Les pompes à eau, c’est date du déluge. Tu sais, quand on fait venir les hommes et les bêtes deux par deux pour la reproduction.

 

Les pompes à sang, c’est gore ; j’y vais à reculons.

 

Les pompes à vélo, çà use : Une fois sur deux tu reviens avec ton vélo pendu entre deux branches comme pour le gibier.

 

Mais la pêche que je fais de temps en temps, c’est la pêche à pomper l’air. L’air, tu le mets en boite. Et tu t’installes en ville dans un lieu très passant, et tu cries : « il est beau mon bol d’air ! L’est pas cher ! De l’air de pêcheur de chaussures c’est votre chance du jour! !

 

Tu peux aussi te planter devant l’autre et tu lui dis, yeux dans les yeux mains sur les hanches, comme moi, là, devant toi :

        

               « C’est pas que tu m’pompes l’air vu que tu sais pas pêcher, mais si tu partais chasser les escargots ?

 

CHRISTOPHE LAROCHE

 

Jean-Hugues Varna

Tronçonneur de malheurs

 

Les lettres se détachaient lisiblement de l’ancienne plaque en cuivre, patinée par le temps, consciencieusement vissée sur la lourde porte d’entrée.

Ce n’est qu’en s’approchant que l’on pouvait lire en dessous :   En tout genre

Des malheurs, Jean-Hugues en avait tronçonné des centaines. Son père, son grand-père, avant lui, faisaient de même.

On venait le voir de très loin, la réputation de la famille étant connue au- delà des dernières collines visibles depuis le clocher du village.

Chacun arrivait avec de gros malheurs accablants, le genre de malheurs qui pèsent tant que l’énergie vitale vient à manquer.

L’idée était fort simple : tronçonner un énorme malheur, insupportable, en petits malheurs, individuellement compatibles avec une vie quotidienne relativement normale. Petits malheurs plus faciles à digérer, à assimiler, l’un après l’autre, dans l’ordre désiré. Au bout du compte, le malheur originel pouvait ainsi être surmonté.

Cette façon de procéder convenait à la majorité des visiteurs.

Si jamais le résultat se faisait trop attendre, qu’un ou plusieurs petits malheurs ne passaient pas, Jean-Hugues disposait d’une solution complémentaire : envoyer le malheureux voir le rémouleur d’optimisme, facile à reconnaître avec sa meule qui chantait joyeusement, baladée au hasard des rues du village.

Il n’était guère de petits malheurs qui résistaient à l’affûtage des pensées positives, lesquelles finissaient toujours par avoir raison des résistances des plus récalcitrants.

 

 

 

 

 

 

24 mars 2012

Crimes exemplaires

SABINE RIMAUD

Utiliser la phrase choisie parmi plusieurs propositions  « la seconde hypothèse est la plus effarante ».

 

J’ai trouvé sur le sol du salon en entrant la poupée de Charlotte. Eventrée.

Soigneusement découpée aux ciseaux ; du thorax au nombril.

 

La paille et le coton qui remplissent le jouet

Lardés de cicatrices; au couteau.

 

Le plus surprenant c’étaient ces traces, sur le tissu :

Clotilde avait déniché le flacon d’éosine,

Assez judicieusement versé aux endroits adéquats des rougeurs pour indiquer un crime.

 

Je m’assis en silence.

Pourquoi Clotilde avait-elle trucidé Léonie ?

 

La première hypothèse:

Dispute entre frangines, l’aînée passe sa colère sur le jouet préféré de Charlotte ; simplement.

 

La seconde hypothèse est la plus effarante :

Clotilde n’a jamais accepté l’arrivée de Charlotte dans la famille.

Et là, Léonie, c’est Charlotte pour Clotilde…

 

Clotilde qui pousse Charlotte sur le sol, brutalement ;

Clotilde qui lève le bras et l’abat sur le ventre ; de Charlotte ; évidemment.

Clotilde qui va d’un geste vers le cœur ;

Puis Clotilde qui redescend le couteau vers le sexe, en ricanant.

 

Je me secoue  et crie : « c’est absurde ! Les enfants  sont des anges, pas des ogres ! »

 

Je n’ai rien demandé à Clotilde qui rentrait en chantant.

Quand Charlotte arriva à son tour, je lui dis que j’étais désolée :

Cambriolage au rez-de-chaussée par des amateurs de poupée, antiquaires sans doute.

Elle m’a longuement regardé…

 

Nous n’avons jamais reparlé toutes les trois de la longue destinée de Léonie la poupée.

 

CHRISTOPHE LAROCHE

Effarante hypothèse

 

- La seconde hypothèse est la plus effarante, décréta le commissaire Moubarok, tandis qu’il considérait les restes encore fumant du cadavre.

Au fait des compétences de mon supérieur, de son intuition, moi qui le côtoyais depuis tant d’années, ces quelques mots me glacèrent le sang.

Comment imaginer un scénario plus horrible que celui qui s’était tout d’abord imposé.

Ces morceaux de chair découpés avec la méticulosité d’un boucher, fier de son diplôme de meilleur artisan de France, la façon dont ceux-ci étaient disposés, rappelant étrangement un tableau de Francis Bacon, leur odeur rehaussée par un subtil relent d’une eau de Cologne bon marché, tous ces indices convergeaient vers la même solution.

Quelle était donc cette seconde supposition encore plus effroyable ?

Je n’osais questionner le commissaire, de peur de souligner les limites de mon imagination à celui qui m’avait tout appris.

Moubarok tira à nouveau sur son narguilé.

- Plus j’y pense et plus cela s’impose. Voyez-vous ceci ?

Je cherchais fébrilement du regard l’indice que devait m’indiquer son index.

En tendant le cou, je finis par remarquer ce détail incongru. Sur le crâne sanguinolent, une trace brune, visiblement le résultat d’un choc électrique.

- Vous voulez dire que…, chuchotais-je timidement.

- Parfaitement, ce meurtre n’a rien de halal. Nous n’avons rien à faire ici.

Ce furent les dernières paroles de Moubarok avant qu’il ne tourne les talons.

Il faut dire que le commissaire ne rigolait jamais avec les traditions.

 

 

SABINE SALOMON

A partir d' un incipit: «Devant la maison, un soir, j'aperçois une lumière à la fenêtre».

 

Devant la maison, un soir, j'aperçois une lumière à la fenêtre. Fenêtre du haut. Celle de la pièce condamnée.

Je vis seule.

Ai-je oublié d'éteindre? Non! Impossible! Plusieurs mois que je n'ai plus mis les pieds dans cette pièce!

Mon sang ne fait qu'un tour. Mes poils se hérissent. Mon cuir chevelu s'électrise. Flux et reflux dans la colonne vertébrale.

La peur! La vraie peur!

Rapidement, le sursaut: me secouer! me défiger! Oui! Ça se décale: une fulgurante curiosité me ranime! Quelque chose d'extraordinaire est peut-être là, à portées de mains! Maintenant!

Faire face!

Mes yeux écarquillés captent mieux: un profil d'homme, en ombre chinoise, se découpe sur le mur blanc!

Mon coeur devient tambour.

L'ombre devient appel.

Rythme viscéral. Echo viril.

Cette mise en scène attise tous mes sens; éveille une attirance sauvage.

J'y vais! J'ai du cran!

 

Traversée du jardin: rassemblée, je marche:

chaque pas est pas de la femme vers l'homme.

Chaque pas porte la femme au coeur tambour vers l'inconnu, au profil immobile.

Présences démultipliées.

 

J'atteins la maison; monte direct.

Sur le palier, je me mets à chantonner; cherche courage.

Me sens sirène.

Veux attirer la bête hors de son antre.

Rien ne bouge.

Je sais qu'il m'attend.

Qui il? Kill? Mauvais présage!

J'appelle.

Rien.

Je n'ai pas envie de reculer. L'instant est si puissant.

J'ouvre la porte. Il ouvre ses bras.

Tous deux , debout. Deux mètres entre nous. Tous deux immobiles.

Son regard est acéré. Il me glace.

Je résiste. J'accepte le combat. Nos yeux sont nos armes: jets de lames aiguisées; torrents de mercure insaisissable; flots de lave en fusion. Joutes dans nos orbites et  dans nos tripes.

Tout remonte!

A croire que tout se rejoue là : «être homme ou être femme».

La différence des sexes lacérée, triturée, transpercée!.

Ca sort! Une heure, deux heures, trois heures! Sans un mot. Debout. De bout en bout. De l'intérieur. De lui à moi. De moi à lui.

La porte du monde se ferme.

Enfin,l'homme s'approche, m'effleure, me touche.

Lui et moi! Seuls! Nous nous cherchons sans rien vouloir.

Le monde déjà loin, derrière la porte.

Nos peaux se connaissent à tâtons, tremblantes de proximité, baignées de gratitude.

Il n'y a plus d'ailleurs.

Etreinte. Chaleur animale.

Au coeur de nos sens. Au bout du bout de nos corps.

Propulsés, implosés de désir.

Lui, mon île. Moi, ses ailes de plaisir. Et l'inverse, aussi.

Nos mots sont chants de feu.

Nos corps comme deux mains d'infini.

Incandescence à voltiger si loin. Pour moi, pour lui, c'est l'évidence. Ça n'en finira pas de nous étonner.

L'extase est sans limite.

Notre monde n'en finit pas de s'ouvrir.

Temps sculpté. Déchirure incarnée.

Caprices des corps saisis dans l'ivresse.

Et l'autre qui ensemence le désir, désir fou, fou de liberté.

 

Ces jours, ces nuits nous raptent, nous mènent.....Où? Où ça?

Où bat le coeur tambour?

Le voyage est sans détour, sans retour.

 

L'homme est parti, un soir. J'ai aperçu son ombre immense sous le réverbère. Puis, il a glissé tout en bas, sous le nuage de sable.

Etreinte non éteinte.

Son empreinte, je la distingue encore sur le blanc du mur.

Etreinte non éteinte.

Le voyage est sans retour.

 

Comment l'homme, s'était-il introduit chez moi?

Pour quelle raison ou déraison?

Quel espoir ou désespoir?

Pas une seule piste.

Seul, le mystère.

 

FREDERIC POYET

Nouvelle fantastique avec choix du titre dans une liste:

Sur son échafaudage mobile, tout en haut de cette tour de verre aux mille reflets, le laveur de

carreau s’accordait une petite pose.

Contemplant son reflet dans cet immense miroir son esprit vagabondait, mille et une pensées

se bousculaient, quand soudain la baie coulissante s’ouvrit.

Face à lui, dans une immense prairie, une reine de coeur colérique, un lapin très en retard, et

une théière dodue et sympathique le dévisageaient encore plus surpris que lui!

En passant la porte de mon appartement, je senti immédiatement ce délicat fumet en

provenance de la cuisine.

Depuis ce matin, le ragout cuisait à feu doux.

Soulevant le couvercle, j’ajoutais quelques herbes de Provence et une pincée de sel, avant de

descendre à la cave chercher un grand cru.

Il fallait que ce soit une fête.

Ce soir j’avais un très vieil amis pour le diner, j’espérais que la marinade et la cuisson

avaient rendu sa chaire bien fondante.

La seconde hypothèse est la plus effarante.

De deux choses l’une, ou c’était du premier coup, ou il s’y était repris à deux fois.

Au premier abord, il avait agit seul.

Mais il y avait trois empruntes, deux de trop, ça faisait donc trois tueurs.

Ils avaient agit en deux temps trois mouvement, avant de filer en quatrième vitesse.

Peut-être un cinq à sept qui avait mal tourné, pensa-t-il.

 

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