Créer un nouveau monde
MON UTOPIE DU JOUR
à la tortue Modestine
et aux passantes
de l'atelier d'écriture Utopie
Connaissez-vous l'île de Modestine ?
Elle ne fait pas de bruit et croit
aux traversées obstinées dans le vert.
Peut-on dire qu'elle règne ? À la rigueur,
mais en toute discrétion,
ou bien alors
si régner se fait en s'écrasant
comme le chien Fiore
au beau milieu de la sieste méridienne.
L'île de Modestine est prospère à souhait
pour qui savoure les feuilles sans peur d'en manquer.
À l'heure où j'écris ces lignes,
les habitants de l'île sont
dix femmes et un homme, un chien, une tortue
sans oublier la cohorte des invisibles
qui accompagnent l'atelier jusqu'au soleil du couchant.
Mais il peut arriver qu'ils deviennent
dix tortues et un chien, ou dix hommes et une femme etc...
L'essentiel pour eux est
qu'ils désapprennent à compter
en méditant sous carapace ou en faisant des roulés-boulés.
Les habitants de l'île de Modestine
ont établi une constitution, à force de dur labeur
entre les feuillages et les saisons,
mais le jour où ils l'ont achevée, un coup de vent
séditieux a emporté tous les feuillets, tous les articles
dans la mer qui entoure l'île.
Les commentateurs aguerris doutent que l'île de Modestine
puisse tenir longtemps encore
sans chamaillage de silences.
C'est parier sans compter
sur l'agilité des Modestiniennes,
leur capacité à déjouer les pratiques imbéciles.
Les commentateurs deviendront hors service
bien avant l'échappée belle des Modestiniennes.
Sur l'île de Modestine, on n'en a jamais fini
avec le cheminement des intelligences, à commencer
par le ras des pâquerettes.
Entrer en vibration avec l'autre
est le sport national en vigueur.
DOMINIQUE SORRENTE
Endoume, le 8 mars 2021
*
Marie-Françoise MONTEBELLO
Pourquoi ne pas imaginer le meilleur ?
Pourquoi ne pas imaginer le meilleur ?
Le pire fait tellement plus de bien parfois.
Le pire troue les oreilles, arrache les pas,
casse les mémoires, abrutit les journées.
Le pire vit au fond du bassin où j'imagine notre noyade.
Elle eut lieu dans une rivière en Norvège.
J'ai longtemps vécu au fond de ce bassin,
puis d'un seule coup de la pointe du pied,
une poussée inconnue m'est venue,
me faisant remonter vers le haut.
Le meilleur vivait là, tout seul, sur le rebord du monde,
sans aucune imagination.
Il m'a tendu une serviette éponge
et m'a souri.
Puis il m'a montré la couverture d'un carnet
à écrire. Il y avait ces mots d'Oscar Wilde:
j'ai les goûts les plus simples du monde.
Je me contente du meilleur.
Il m'a montré la couverture d'un carnet à écrire.
DOMINIQUE SORRENTE